Notre Robin des bois, bientôt hors-la-loi {}[]{}
Notre ami Robin Renucci est intervenu ce lundi 14 décembre 2015 à la Cité de l'Immigration à Paris, dans le cadre d'une journée nationale de formation sur le "parcours artistique et culturel".
Voici le texte de son intervention.
Je tiens à vous dire tout d’abord combien je suis sensible à la demande qui m’est faite de prendre la parole aujourd’hui devant vous, à l’occasion de cette journée nationale de formation concernant « La mise en œuvre du parcours d’éducation artistique et culturelle : un enjeu partagé ».
Je remercie la ministre de l’Education nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche d’avoir pensé à moi pour prolonger votre réflexion et peut être apporter un regard un peu différent, sur la question générale de l’éducation artistique et culturelle qui me préoccupe depuis fort longtemps.
Dois-je vous avouer que j’hésite avant d’accepter ce genre d’invitation ? .....................
(La suite de cette intervention est ci-dessous, après la deuxième vidéo)
n : À Avignon, cet été, vous proposez un spectacle itinérant, L’enfance à l’œuvre*, dans lequel vous explorez l’imaginaire de nos jeunes années à travers les textes de grands écrivains. Qu’est-ce qui vous intéresse dans l’enfance ?
Robin Renucci : Aux Tréteaux de France, que je dirige depuis 2011, notre mission est d’aller à la rencontre des publics qui ne viennent pas au théâtre. Notre compagnie travaille actuellement sur le thème de la production de la richesse. Travailler, est-ce uniquement gagner sa vie ? Ces 730 000 heures d’espérance de vie, dont nous disposons aujourd’hui à la naissance, peut-on les enrichir en faisant abstraction du matériel ? L’enfance est le lieu par excellence du travail invisible qui ne se monnaie pas. Qu’est-ce qui œuvre dans l’esprit d’un enfant ? Comment participer, en tant qu’éducateur, à l’éveil d’une âme ? Certains écrivains en parlent très bien. J’ai eu recours à leurs textes pour faire naître des images dans l’esprit du public.
Faire naître des images avec des mots ?
R.R. : Mon bonheur, c’est de relier à la littérature le public qui n’a pas toujours eu la possibilité de la rencontrer. Pour cela, je me fais le médium des grands auteurs, je partage leur œuvre, je donne à voir leurs mots. C’est cela mon projet : communier avec le public à travers les sensations de l’enfance. Je lis Marcel Proust qui, enfant, attendait désespérément un baiser de sa mère. De cette attente est née une œuvre majeure. Arthur Rimbaud qui, très jeune, écrit en vers ses premiers émois.
Ou encore Romain Gary, à la fois porté et lesté par l’ambition de sa mère qui lui inspirera son texte phare, La promesse de l’aube. Pour ces enfants singuliers, la vocation se forge dans l’attachement et la contrainte.
Vous êtes accompagné par un pianiste. Quel rôle joue-t-il ?
R.R. : La douceur du piano de Nicolas Stavy participe à la compréhension des textes, en amplifiant l’émotion. Nous formons un duo propice à la rêverie qui caractérise ce premier temps de la vie. En soixante-cinq minutes, tous les sens sont mis en éveil pour ouvrir l’âme.
Votre propre enfance à Tonnerre, dans l’Yonne, vous mène à cultiver tôt l’imaginaire…
R.R. : J’ai grandi dans un cadre hostile : une caserne des années 1950. Mon père y était gendarme et ma chambre, située juste au-dessus de la cellule de dégrisement. Dans cet univers glacé, ma chance fut d’avoir une mère corse, nostalgique de son île, qui racontait des histoires de là-bas. Très vite j’ai investi le champ symbolique de l’imaginaire qu’elle me proposait, pour mettre à distance mes angoisses.
Je craignais les cris des ivrognes, mais j’avais compris que je pouvais les transposer dans des histoires d’ogres. Transformer le plomb en or.
Très tôt aussi, des enseignants vous ouvrent à la culture.
R.R. : La petite pousse que j’étais a eu la chance de rencontrer de merveilleux jardiniers qui l’ont arrosée et fait grandir. Comme le Petit Poucet, j’ai rempli, grâce à eux, mes poches de cailloux blancs qui m’ont sauvé.
Quand et comment attrapez-vous le virus du théâtre ?
R.R. : Ma mère était couturière, et travaillait régulièrement pour le théâtre. Un été, des comédiens ont débarqué à la maison récupérer leurs costumes. Pas n’importe quelle troupe, celle du TNS, à Strasbourg : une famille théâtrale liée à l’éducation populaire. Dans la foulée, je fais un stage qui mêle amateurs et professionnels. J’ai 16 ans et je me trouve à égalité avec des professionnels qui s’occupent de moi, me font goûter le verbe, la pensée, aborder la question politique au sens noble du terme. Cette expérience forge ma conviction que l’art doit participer à rendre chacun acteur de sa vie.
Dans votre approche du théâtre, la culture et l’éducation se mêlent…
R.R. : Pour moi, on ne s’éduque pas sur l’art, mais par l’art. C’est sa pratique qui ouvre le regard, pas sa consommation. Notre société a multiplié l’offre de culture, mais pas le désir de l’art. Or, ce désir se cultive. En famille, à l’école de la République et dans le monde associatif.
J’ai eu la chance de bénéficier des trois, et d’accéder jeune au Conservatoire national supérieur d’art dramatique, à Paris, dans une classe de seulement douze élèves.
Votre travail dans le cinéma a très vite été couronné de succès : César du meilleur acteur, en 1986, pour Escalier C, de Jean-Charles Tacchella. Pourquoi avoir pris ensuite d’autres voies ?
R.R. : Vers 35-40 ans, je me suis dit que gagner de l’argent ne m’était pas vital, et qu’il fallait que je retrouve mes valeurs humanistes.
Je suis revenu vers le théâtre, avec Le soulier de satin, de Paul Claudel, mis en scène par Antoine Vitez. C’était en 1987, et la première fois que je participais au Festival d’Avignon. Douze heures non-stop de spectacle dans la Cour d’honneur du Palais des papes : une expérience inouïe ! Le théâtre est une religion, au sens où il relie les êtres dans une communion laïque.
Puis j’ai fondé les Rencontres internationales artistiques, à Olmi-Cappella, le village de Haute-Corse de mon enfance. Depuis vingt ans, les habitants accueillent tout au long de l’année des jeunes comédiens amateurs de toutes origines, qui se forment et viennent travailler avec des professionnels aguerris. Ayant reçu beaucoup, je me sentais redevable. J’avais envie de donner, de mon temps et de mon énergie. Le plaisir du partage ne coûte rien, et il n’y a rien de plus beau !
Vos valeurs sont-elles partagées dans le monde du cinéma ou du théâtre ?
R.R. : Très moyennement. Cela étant, je rencontre de plus en plus de gens sensibles à l’éducation populaire : des directeurs de Centres dramatiques nationaux, ou des metteurs en scène. Au théâtre, on se pose la question de l’œuvre et de son sens. L’an dernier, par exemple, j’ai mis en scène L’avaleur, de Jerry Sterner, un homme d’affaires et dramaturge américain.
Sa pièce éclaire le monde de la finance, et aide le public à comprendre les enjeux d’aujourd’hui.
Depuis sept saisons, vous incarnez le médecin de campagne d’Un village français. Pourquoi ?
R.R. : Au départ, j’ai fait le choix de la télé pour que mes parents, qui n’allaient ni au cinéma ni au théâtre, me voient jouer. J’aime la vérité de ce médecin, un honnête homme, pris dans les filets de la Seconde Guerre mondiale. Ce n’est pas un héros ; il cherche à poser des actes justes avec parfois des conséquences terribles. Quand il choisit de ne pas faire fusiller dix personnes, il se retrouve dans l’obligation d’en désigner une pour sauver les autres.
C’est dans la complexité des situations qu’on touche à la vérité des êtres.
Qu’aurions-nous fait à sa place ? Et que faisons-nous aujourd’hui face aux migrants ? Leur ouvrons-nous nos portes ? Interpréter ce personnage dont la conscience évolue est un acte citoyen.
Cet engagement citoyen, c’est une tradition familiale ?
R.R. : Mes deux grands-pères maternel et paternel ont été résistants. Comme eux, je suis attaché aux valeurs du Conseil national de la Résistance, où des politiques de bords différents ont posé ensemble les bases de la reconstruction de la France : l’éducation pour tous, la séparation des banques et de l’État, des médias et de l’État. Ces aspirations républicaines sont plus que jamais à défendre.
Vous qui aimez transmettre les valeurs humanistes, qu’avez-vous à dire aux enfants d’aujourd’hui ?
R.R. : De s’enrichir de la différence de l’autre, de rajouter à notre devise Liberté, Égalité, Fraternité le mot « hospitalité ». Je leur souhaite une école qui retrouve sa vocation d’éveil et de transmission. L’une des grandes inégalités aujourd’hui, c’est la maîtrise du langage. C’est quand les mots sortent de la bouche que naissent les pensées, et que se construisent les futurs citoyens. b
* Du 7 au 26 juillet. Un spectacle itinérant dans le cadre du Festival d’Avignon.
Rens. : www.festival-avignon.com et www.treteauxdefrance.com
Je tiens à vous dire tout d’abord combien je suis sensible à la demande qui m’est faite de prendre la parole aujourd’hui devant vous, à l’occasion de cette journée nationale de formation concernant « La mise en œuvre du parcours d’éducation artistique et culturelle : un enjeu partagé ».
Je remercie la ministre de l’Education nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche d’avoir pensé à moi pour prolonger votre réflexion et peut être apporter un regard un peu différent, sur la question générale de l’éducation artistique et culturelle qui me préoccupe depuis fort longtemps.
Dois-je vous avouer que j’hésite avant d’accepter ce genre d’invitation ?
C’est que la place d’un artiste de théâtre se trouve principalement sur les plateaux, auprès des publics, dans les lieux de formation et de transmission … plutôt qu’à la tribune d’une réunion, fut-elle interministérielle. Les artistes n'ont pas à donner de leçon, à affirmer une quelconque vérité, pas plus qu’à servir de caution artistique ou intellectuelle à tel ou tel projet de communication politique ou institutionnel. Je me garde donc de moi-même…
Et pourtant…
Ce, qu'en moi, l’artiste hésite à faire, le citoyen se sent tenu de l’accomplir.
Les attentats récents qui se sont produits à Paris nous bouleversent et nous interrogent. Les commentaires et propositions de toute nature se multiplient pour expliquer l’état de notre pays et suggérer les solutions les plus adaptées. Avec la sécurité et son cortège de mesures, avec le social et l’économie qui demeurent sources de tant d’inquiétudes, l’éducation et la culture sont évoquées, à juste titre, comme pistes urgentes d’investissement et de mobilisation. (C’est pourquoi j’ai répondu favorablement à l’appel de la « réserve citoyenne ».)
Si j'ai accepté de vous rejoindre dans ce contexte, c’est pour dire une fois encore les raisons de mon engagement, partager avec vous quelques réflexions, mais aussi pour insister, en toute franchise, sur quelques propositions qu’il me semble indispensable de mettre en œuvre.
Je veux préciser que mes propos sont nourris de nombreux échanges, notamment avec mes amis : Bernard Stiegler philosophe, Emmanuel Wallon professeur de sociologie politique à l’Université de Paris-Ouest Nanterre, Jean-Gabriel Carasso militant et auteur de nombreux ouvrages sur l’éducation artistique et culturelle. Enfin, je sais ce que je dois au collectif « Pour l’éducation, par l’art » que nous avons constitué en 2012 afin de participer au débat sur la mise en place du « Plan national d’éducation artistique et culturelle » annoncé par le Président de la République.
Dans toutes mes activités (et particulièrement dans mes missions de directeur du Centre dramatique les Tréteaux de France) je tente, avant tout, d’être fidèle à cet « héritage sans testament » que nous ont laissé nos prédécesseurs Jacques Copeau, Charles Dullin, Jean Vilar, Antoine Vitez et tant d’autres... A savoir : donner du sens à notre travail artistique, l’inscrire dans une préoccupation citoyenne, répondre aux enjeux du moment et préparer, autant qu’il est possible, un avenir à nos enfants. Je m’inscris dans leur histoire, dans le sillon tracé par le Conseil national de la Résistance, derrière les pionniers de la décentralisation théâtrale et ceux de l’éducation populaire qui ont façonné la France de la seconde moitié du XXe siècle en la dotant de nombreux équipements culturels et institutions artistiques, sur l’ensemble des territoires. Avec eux, derrière eux, j’essaie de prendre ma part du travail collectif pour une culture de « l’élévation tout au long de la vie » et pour un partage le plus large possible de la parole symbolique : projet qui me paraît plus que jamais essentiel.
Nous vivons, chacun le sait, une mutation anthropologique considérable, une « grande métamorphose » comme le dit Edgar Morin, qui va bien au-delà de la simple « crise » de nos systèmes économiques. La mondialisation, le numérique, les nouvelles technologies de la communication, l’impérialisme du marché et son corollaire - le mercantilisme, l’individualisme - et son envers - le communautarisme, la barbarie renaissante (et avec quelle violence aujourd’hui !), les conflits religieux… Toutes ces évolutions ont des implications économiques, sociales et environnementales considérables.
Elles s’accompagnent d’un immense combat culturel et éducatif que certains d’entre nous ont appelé la Bataille de l’imaginaire. Il ne s’agit pas seulement d’une bataille (oh combien importante) pour « l’exception culturelle » ou « les droits culturels », conçus comme préservation de l’identité des peuples et de leur capacité à s’exprimer, mais plus profondément de l'opposition féroce entre le signe et le symbole, entre l’injonction et la liberté d’interprétation, entre le silence et la parole…
Chacun d’entre nous - et les enfants plus que les autres - sommes désormais des " cibles" ; priés de laisser au vestiaire toute singularité, tout désir authentique, toute velléité d’expression et de création singulière. La parole véritable, la parole singulière est confisquée !
Dans le monde de la publicité et du marketing, ailleurs, dans celui des fondamentalismes religieux ou du simplisme politique démagogique (l’actualité vient de nous le rappeler avec force !), le signe est dominant qui veut nous imposer une vision univoque du monde et nous contraindre aux comportements moutonniers du consommateur (de biens, de services, d’idées, d’imaginaires…)
C’est dans ce contexte général de lutte contre la réduction des têtes par les « marchands de temps de cerveau disponible », contre la pensée réduite au slogan, contre la démagogie décomplexée, contre la barbarie sanguinaire, que se situe notre espérance dans l’éducation artistique et culturelle, comme véritable découverte, puis appropriation du mode symbolique que constituent précisément l’art et la culture, la création esthétique et sa pratique.
Faut-il préciser qu’en évoquant « l’éducation artistique et culturelle », je ne parle pas seulement :
- d’un aménagement marginal de notre système éducatif (quelques minutes d’atelier artistique en fin de journée, pour se détendre ou récupérer des élèves qui décrochent) ;
- ni d’une approche strictement disciplinaire, telle l’Histoire des arts (pour laquelle j’ai le plus grand respect, mais enfin… l’histoire de la natation n’a jamais appris à nager à personne !)
- Je ne parle pas, non plus, du seul développement nécessaire de la fréquentation des œuvres et des institutions culturelles (combien d’enfants « touchés ? »), ni du seul "accès à l’art et la culture" ;
- ni même de la réduction des « inégalités d’accès à la culture », qu’elles soient sociales ou géographiques.
Tous ces objectifs ont leur noblesse à mes yeux et leur nécessité, mais l’éducation artistique et culturelle répond, à nos yeux, à des enjeux plus importants encore.
Il s'agit d'un élément fondamental de l’individuation et de la socialisation de nos enfants, c’est-à-dire de la construction des individus et de la société, à travers des pratiques artistiques, symboliques, sensibles…
Et j’ajoute : collectives.
Il s’agit de permettre à chacun de construire sa « singulière dignité », notamment dans le domaine théâtral, par une authentique pratique de sa « langue » (au sens propre comme au figuré). « La parole authentique nous importe plus que le discours » écrivait Jacques Lecoq, grand maître du théâtre. Cet enjeu est le véritable moteur de mon engagement (comme celui de très nombreux artistes, enseignants, éducateurs, élus… qui travaillent dans ce domaine depuis fort longtemps.)
Car il ne suffit pas d’apprendre à lire, écrire, compter… encore faut-il, aussi, apprendre à DIRE ! Ce qui manque cruellement à une grande part de notre jeunesse.
Nous nous sommes donc réjouis de l’engagement du Président de la République, de la dynamique enclenchée depuis par les ministères de l’Education nationale et de la Culture, de l’engagement réitéré des ministres successifs, de l’inscription du « parcours artistique et culturel » instauré par la loi du 8 juillet 2013 pour la Refondation de l’école de la République et sur lequel vous travaillez aujourd’hui.
Mais pour que cette conception ambitieuse devienne réalité, pour que notre pays connaisse réellement une avancée décisive et durable, quelques conditions nous semblent nécessaires :
Et d’abord, évidemment, la formation…
Comme l’écrit un auteur célèbre de mes amis : « Il ne sert à rien de mettre en place des dispositifs, aussi pertinents soient-ils, si les acteurs concernés n’ont pas les dispositions de s’en emparer. » Il importe donc d’engager d’urgence un vaste plan de formation initiale des enseignants, des artistes intervenants, des responsables éducatifs et culturels… Précisons : lorsque nous parlons de formation, nous évoquons un véritable « parcours » d’initiation, permettant à chacun de vivre véritablement une « expérience esthétique », et non quelques heures éparses d’un module pédagogique bâclé, qui ne servirait, au fond, qu’à se donner bonne conscience !
Du côté de l’éducation… A quand une véritable formation à la conduite de projets artistiques et culturels dans les Ecoles supérieures du professorat et de l’éducation pour les futurs professeurs des écoles ; très peu d'ESPÉ ont pris des résolutions en cette matière. Sans doute faut-il avancer beaucoup plus rapidement. A l’horizon 2017, toutes les ESPÉ devraient offrir un module opérationnel d’initiation à l’EAC, associant une pratique artistique, un projet culturel et une réflexion pédagogique.
Il est nécessaire aussi de développer les formations dans les universités pour les futurs enseignants, tout autant d'initier les chefs d’établissements ; mieux encore (rêvons un peu), de voir inscrit un « parcours artistique et culturel » au programme de l’ENA afin que les futurs décideurs sachent, pour l’avoir vécu, ce dont il s’agit. Cette expérience ne manquerait pas, j’en suis certain, d’influencer positivement leurs décisions futures…
Du côté des artistes… se pose également la question de la formation, notamment dans les écoles supérieures d’art.
Il s’agit, là encore, d’avancer résolument vers la mise en œuvre de modules adaptés à chaque discipline et à chaque établissement, afin que les futurs intervenants que seront presque tous leurs diplômés découvrent le sens et les modalités d’un partenariat bien conçu : qu’ils découvrent le monde enseignant, prennent conscience des potentialités et des contraintes de chaque âge de la scolarité, qu’ils éprouvent les relations de partenariat et vivent, en situation, la réalisation d’un projet avec les élèves. A cet égard, le travail que Claire Lasne-Darcueil met en place dans son projet pour l’éducation artistique au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique est tout à fait remarquable.
Je veux évoquer également l’exemple de l’ENSATT (Ecole nationale supérieure des arts et techniques du spectacle) à Lyon, dont j’ai l’honneur d’être le président. L'ENSATT est depuis toujours sous tutelle de l’Education nationale. Avec son directeur, Thierry Pariente, nous avons préparé une nouvelle étape de l'école qui donnerait lieu à une co-tutelle de l’Education nationale et de la Culture, avec des modules de responsabilisation des acteurs en matière d'éducation artistique et culturelle. Ce projet attend une impulsion ministérielle et peut-être la contribution financière d’une grande collectivité – mais cette dernière condition ne devrait, en aucun cas, être un préalable car c’est la compétence d’artistes, au plein sens du terme, qui est en jeu.
Sans ces formations initiales indispensables qui forgent le désir et la compétence, parions que le développement de l’éducation artistique et culturelle demeurera illusoire.
Ce chantier est, à mes yeux, une priorité absolue notamment à l’heure où les générations pionnières se retirent, et où la transmission est plus que jamais indispensable…
Une seconde priorité est de multiplier les occasions de formation continue et de formation conjointe des enseignants, des éducateurs et des artistes, pour qu’ils travaillent ensemble à l’élaboration et l’évaluation de projets en partenariat. Sans doute avez-vous évoqué largement ce sujet au cours de cette journée…
C’est ce que nous faisons en Corse à l’ARIA (depuis près d’une vingtaine d’années) et aux Tréteaux de France (depuis ma nomination en 2011) au cours de stages de réalisation. C’est dans ces formations continues, dans ces expériences conjointes, dans ces vécus communs des différents acteurs, que se cristallisent les compétences, se nouent les partenariats, se tissent les réseaux qui seront, demain, les garants d’une qualité et d’une pérennité des projets.
Pour cela, les Universités d’été ont, historiquement, joué un rôle majeur dans les décennies qui précèdent. Or elles ont été fortement réduites ces dernières années quand elles n’ont pas totalement disparu. Il importe de les rétablir rapidement. Des Universités d’été « éducation et culture » devraient être organisées, chaque année, dans toutes les régions, et autour des diverses pratiques artistiques, portées notamment par des associations compétentes.
(Ce fut, je crois, une des principales demandes formulées lors de la rencontre nationale tenue à La Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon en septembre 2014, dont les conclusions mériteraient d’être partagées…)
Je voudrais dire enfin quelques mots sur une proposition portée depuis plusieurs mois par notre collectif « Pour l’éducation, par l’art ».
Une politique de l’éducation par l’art, telle qu’elle se met en œuvre dans notre pays, décentralisée, basée sur une pédagogie de projet, inscrite dans les territoires… sera inévitablement foisonnante et diversifiée, puisqu’elle s’appuiera sur l’invention des acteurs, sur la créativité des partenaires et sur les ressources artistiques territoriales. Pour lui donner sens, nous suggérons la création d’un « pôle national de référence », à savoir une équipe légère, spécialisée, chargée d’observer les initiatives, de les évaluer, de les faire connaître, d’aider les acteurs à concevoir et à améliorer leurs projets, d’accompagner les réseaux existants, de tisser des liens internationaux…
Bref, de permettre à chacun de ne pas rester seul mais de comprendre qu’il participe d’un vaste mouvement national (voire international) qui rassemble des énergies multiples et se nourrit de la coopération et du dialogue. Ce pôle national pourrait être, s’il est bien conçu, un levier efficace pour permettre le développement pertinent d’une politique de l’éducation artistique et culturelle.
Mesdames et messieurs,
Cher(e)s ami(e)s
Je ne voudrais pas conclure ce propos sans rappeler que si, à l’évidence, l’éducation a besoin d’art et de culture pour en finir avec son développement hémiplégique, pour s’adapter à la complexité du monde et à ses évolutions, pour offrir à nos enfants toutes les occasions d’une construction sensible, créative et solidaire… l’inverse est aussi vrai et ma conviction, celle je souhaite partager avec vous est que la création, la transmission, la formation et l’éducation populaire doivent se conjuguer et se réinventer ensemble.
La vie artistique et culturelle à laquelle je contribue a absolument besoin de l’éducation, et pas seulement pour remplir les salles ou pour augmenter les statistiques de fréquentation des institutions, mais pour partager véritablement l’expérience artistique avec des publics formés qui puissent oser être « œuvrés par les œuvres », des publics avertis comme acteurs de la représentation. Il est urgent de renforcer le sens collectif du travail éducatif et culturel et de lui permettre d'accomplir pleinement sa part dans la construction d’une société démocratique et solidaire.
C’est donc un vaste chantier, auquel nous sommes mutuellement conviés, l’attente est immense; avons-nous encore le droit de la décevoir ?
Alors, oserai-je nous dire une fois de plus, mesdames et messieurs, en vous remerciant de votre attention…
Au travail !
Les raisons à cela sont nombreuses. Certaines personnes quittent leur pays pour trouver un emploi ou faire des études : on les appelle communément des « migrants ». D’autres personnes sont contraintes de fuir pour échapper à des violations de leurs droits humains, par exemple la torture et la persécution, ou en raison d’un conflit armé ou d’autres types de crise. D’autres encore ont pu être la cible de violences uniquement à cause de ce qu’elles sont ou de ce qu’elles font, par exemple en raison de leur origine ethnique, leur religion, leur orientation sexuelle ou leurs opinions politiques. Ces personnes-là sont ce qu’on appelle des « réfugiés » ou des « demandeurs d’asile ».
Leur voyage peut être plein de dangers et de peur. Certaines sont placées en détention par les autorités dès leur arrivée dans un nouveau pays. Nombreuses sont celles qui sont confrontées quotidiennement au racisme, à la xénophobie et à la discrimination, ainsi que celles qui sont victimes de réseaux de traite d’êtres humains et d’exploitation.
D’autres personnes finissent par se sentir seules et isolées après avoir perdu les réseaux de soutien que la plupart d’entre nous prenons pour acquis : leur communauté, leurs proches, leurs amis.
https://gouttedor-et-vous.org/Comment-faire-pour-aider-les-migrants
Quel Horreur d'en arriver là. Les erreurs du passé, le colonialisme, le manque d'empathie envers les peuple, la soif du pouvoir et de l'argent, voici le TRISTE bilan de notre civilisation.Il y a tant à dire et à écrire. LPR